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Mythic Window

21 juin 2004

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20 mai 2004

20 mai 2004

Glauquitude, sempiternelle glauquitude

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Putain d’ange.

 

 

Il y a un putain d’ange couché à côté.
Je veux lever mon corps mais je fige le jour et je ne peux pas me lever et je suis tout en plomb et il y a un ange qui se lève à côté.

Et j’avais fait un rêve et je l’ai oublié et mes yeux sont trop lourds et il y a un ange qui ricane à côté et il y a aussi un corbeau et moi je suis en plomb.

Je crois que j’ai dormi trois heures, mais ce rêve durait longtemps et puis ce matin je ne sais pas pourquoi, mais je suis en plomb et je ne peux même pas me redresser.

Et il y a un putain d’ange qui ricane sur mon épaule.

Et puis l’ange se lève et alors je me dis que moi aussi je devrais soulever la couverture, l’ange l’a bien fait. Alors je me redresse et c’est difficile parce que je suis en plomb figé dans le jour et que j’ai fait un beau rêve.
Deux fois cette nuit je me suis réveillé dans le noir, et je me suis rendormi et mon rêve a continué. Je suis en plomb pas facile de se redresser et j’ai fait un beau rêve.

Il y a un putain d’ange qui ricane sur mon épaule.
Et puis dans mon rêve je t’ai vue et même quand je me suis réveillé tu n’es pas morte et dans mon rêve tu étais belle et je voulais t’aimer toujours.

Il y a un putain d’ange qui regarde mon épaule et qui ricane et je voudrais dormir et je peux plus et mon rêve est brisé et je suis en plomb et je ne peux pas me redresser.
Ce rêve était trop beau il a duré mille ans et moi j’ai dormi trois heures. Et pendant mille ans qui ont duré trois heures je t’aimais et ce matin je me réveille et je comprends que le rêve est fini et je suis en plomb et j’ai mal et ma vie c’est de la merde. Je m’en rends compte ce matin et je comprends pourquoi des rêves de trois heures semblent durer mille ans.

Il y a un putain d’ange couché sur le tapis quand je bois mon café et il ricane.

Et je voudrais mourir parce que dans le rêve tu étais si belle que j’ai réussi à te retrouver malgré les deux moments, quand ce putain d’ange n’était pas encore là.

Et je sors de chez moi pour une journée de mille ans qui va durer trois heures.

Il y a un putain d’ange couché devant ma porte et toi tu ne viendras plus.

Et je me dis que mes journées de mille ans ne valent pas les rêves de trois heures quand on s’aimait avant que l’ange soit là et que mes journées me sautent au visage.

Il y a un putain d’ange qui me dit des mensonges dans l’oreille.

Il me dit que ma vie est merdique, dans le ni plus ni moins et que je n’écris pas mal mais que je n’écris pas bien. Que je ne baise pas mal mais que je ne baise pas bien non plus.
Que mon visage n’est pas laid mais que je ne suis pas beau non plus. Que je ne suis pas un alcoolique anonyme, simplement un mec qui minimise. Que je ne suis pas un menteur mais que je ne dis pas la vérité.
Que mes rêves de mille ans pourraient durer toujours mais que c’est moi qui ai voulu que l’ange vienne. Que c’est moi qui t’ai tuée dans la fin du rêve quand j’ai compris que ma vie de dix mille fois mille ans allait recommencer.
Il y a un putain d’ange qui me regarde en face et qui ne me voit plus.

Et je ne veux pas me lever vraiment et je suis en plomb et je voudrais me rendormir une troisième fois mais j’ai perdu le chemin de l’éternité.
Et je t’ ai oubliée.
Je suis en plomb et il y a un putain d’ange qui ricane et qui me demande pardon.

 

 

A droite en entrant

 

Une sonnerie, Deux sonneries, Trois sonneries, et puis un grésillement.
Un cadavre encore frais qui me caresse le ventre, et des pas dans l’appartement.
Un grésillement et j’entends ma voix au téléphone mais je ne peux même pas me rappeler ce que je me suis dit. Je ne me souviens pas et le cadavre est lourd, rigide.

Une sonnerie, deux sonneries, trois sonneries, et puis ma voix qui me parle et puis un grésillement.
Un cadavre encore frais blotti contre mon ventre et des pas qui s’approchent dans l’appartement.
Le téléphone a sonné et je ne sais plus ce que j’ai dit ni à qui j’ai parlé ni même quand le téléphone a commencé à sonner mais je suis certain que j’ai répondu. Et que j’ai reconnu ma voix. Je me sens mort et je sens un cadavre tout frais blotti sur mon ventre et je me souviens d’avoir reconnu ma voix au téléphone et je suis sûr que j’ai dit que j’arrivais immédiatement.

Trois sonneries, deux sonneries, une sonnerie et puis un grésillement.

Un cadavre encore frais et du froid sur mon ventre et des pas qui martèlent un appartement. Le téléphone a sonné et les pas se rapprochent et je suis certain que c’est à ma voix que j’ai affirmé que j’arrivais immédiatement. J’écarte les draps, baignés d’une sueur tiédasse et de foutre gaspillé et d’haleine de mort .Le cadavre me glace le ventre et pourtant j’ai assuré à la voix au téléphone que j’arrivais immédiatement. Et j’ai su qu’il faudrait bien faire face.

Une sonnerie, un grésillement, deux sonneries, un grésillement, trois sonneries, un grésillement.
Une sonnerie.
Un cadavre encore frais et des pas dans un appartement.
Je retourne le cadavre et je m’assieds sur le lit en me demandant ce que j’ai bien pu me dire, alors j’allume une cigarette et j’allume la télé et je regarde les émissions de la nuit et je me dis que je dois y aller et c’est sûr mais je ne sais plus où ni quand le téléphone a sonné ni même quand il a commencé à sonner. Mais il y a des pas dans l’appartement, c’est certain, je les entends.

Une sonnerie. Un cadavre. Des Pas. Une sonnerie puis un grésillement.
Ma voix à la télé et puis mon visage qui me fixe et qui ne fait semblant de ne pas me reconnaître. Et je me souviens que le téléphone a sonné mais je ne sais plus ni où ni quand, mais je suis certain qu’il a sonné et qu’une voix que j’ai oubliée ma dit de me dépêcher. Que l’on m’attend. Immédiatement.

Une sonnerie. Deux sonneries. Trois sonneries. Un grésillement.
Un cadavre encore frais et des bruits de pas.

J’ai froid et j’ai envie d’une autre cigarette. La fumée me brûle la gorge et la poitrine et je tousse comme la voix du téléphone. Je sais que le téléphone a sonné et j’entends des pas dans l’appartement.
Et j’allume une autre cigarette et je fais tomber les cendres sur la peau trop blanche du cadavre, sur le lit. Et il me sourit et me dit de me dépêcher. Que l’on m’attend. Immédiatement.
Et je ne lui réponds pas. Il me montre mon visage sur l'écran. On m'a dit de me dépêcher, que je peux encore entendre le bruit des pas.

Une sonnerie, deux sonneries, trois sonneries un grésillement et puis plus rien…

 

 

 

 

 

 

Syndrome d’alcoolisme fœtal

 

Je veux reprendre mon emploi. Cet emploi était le mien et je m’y plaisais. Je m’ennuie. Maman à la maison et Papa au bistrot et ces mômes contents qui n’auront pas de chance. C’est tout. Je regarde l’étendue des possibilités et je referme la main. C’est gratuit aujourd’hui de proposer des mutations somatiques faciles à cloner. Une chimère, des chromosomes qu’on propulse en dehors du néant pour acheter de l’avenir.
J’ai pas le temps de décorer les jours à venir. Ca demande du goût et je n’en n’ai plus. Ma langue ne passe plus que sur mes lèvres et il ne reste que des relents de sel sans iode. Je veux reprendre mon emploi. Les enfants jouent dans mes gonades et sont pressés de rencontrer des mondes gris, des avenues de plaisirs bonbons et de fêtes sans joie. Déguisés en clowns, en cloches comme Papa. Mon emploi était le mien et je suis désoeuvré. J’ai acheté des tickets pour emmener mon amour voir un Laurent Gerra de carnaval imiter Bézu au supermarché du coin. Je suis sûr que ça la fera rire. On en profitera pour aller saliver devant les merveilles en bouteille. De l’évasion à six degrés bon marché.
Après on s’en ira fêter l’anniversaire de notre rencontre dans un marché aux fleurs et elle sera belle comme au premier jour et on sera complètement morts. On essaiera de faire semblant de se téléphoner et on fera comme si on avait des portables et on rejouera la passion et elle me laissera filer chez Juju pour prendre de la gnôle. Elle fera comme si c’était exceptionnel parce qu’elle sera heureuse.
Et je lui dirai que je l’aime et elle rigolera et elle m’embrassera et elle me dira que tout est encore possible et elle fera même semblant d’y croire, et moi aussi. Elle fera semblant d’oublier qu’on est tous les deux hétérozygotes pour pleins de trucs pas croyable, pour la malchance en boîte et les heures perdues, pour les jours d’ennui et les si j’avais su.

Je veux reprendre mon emploi. Cet emploi était le mien et il me permettait de faire semblant. Je croyais que je pouvais m’en sortir, de ces nœuds pas possibles, de ces questions d’argent et de ces mois qui bourdonnent. Mon amour me croyait et déchirait mes voiles. On n’est pas partis mais on continue à faire passer la choucroute en boîte avec de la villageoise et les enfants s’ennuient et sont pressés de sortir pour monter à leurs copains toute la belle collection de mutations létales que Papa et Maman leur ont légué. Papa et Maman sont au bistrot et regardent les enfants qui n’existent pas se souvenir des nuits où les anges venaient les caresser. De toutes ces nuits d’alcoolisme fœtal et de dépression autosomique dominante. De ces suicides héréditaires et de ces destins ratés, il ne reste que quelques mutations germinales qui ne demandent qu’à sombrer dans le vide d’un lit, dans la ménopause de l’avenir. Des mutations qui cachent leur joie dans des spermatozoïdes ivres morts et des ovules lascifs. Les enfants sont contents, Papa est au bistrot et puis maman l’attend ; ils n’auront pas de chance.

 

 

Juillet 67-Novembre 03

 

Lille Europe, minuit vingt. Des pendules qui grincent au dessus de murs gris et les visages du désespoir qui attendent leur tour sur des bancs en acier. Des minutes de silence qui peuvent durer des heures et des heures qui cognent au milieu de l’ennui. Les heures. Les heures sont toutes attablées en terrasse et distillent mes jours qui s’enfuient au compte goutte.
Une sonnerie brûlante, une voix informe baragouine du rien, et puis les heures s’ébrouent. Les heures, avec leurs visages de nulle part, avec leurs airs de certitude et de j’y suis j’y reste. J’ai attendu des heures que les heures se taisent. Les heures sont venues frapper trois fois à la vitre de mon compartiment au moment où je m’y attendais le moins. Les heures m’ont tiré du sommeil et ont franchi les limites de ma patience. Les heures. Les heures sont les bourreaux de mes avenirs vaincus. Les croque-morts de mon attente. Les heures durent des heures et je ne les compte plus.

Lille Europe, minuit vingt, je vois des visages et ces visages ont des airs de nulle part. J’ai cassé la limite. J’ai franchi toutes mes portes en un unique soir, des portes condamnées sur la solitude. Pour une vadrouille en vrac, pour des sensations fortes, j’ai occupé ma nuit à rencontrer les heures. J’avais pris ma voiture dans une neige crasse. Les routes de campagne un dimanche de novembre. Le soleil tombé, la lumière pâle des années d’avant ma naissance. Les années soixante qui faisaient leur come back comme ça. En novembre. Pour quelques heures. Pour quelques heures seulement. Je roulais dans l’hiver soixante sept et la lumière glissait. Mes phares giflaient la droite de la route défoncée, dans une neige sale et dans des heures perdues. Je cherchais mon été dans les nuits sales de novembre. Mon été soixante sept. Les soleils humides et les regards remplis de vide. Sur une plage perdue, on s’était tout dit on était repartis. On s’était tout dit sans rien avoir compris. Sous une lumière pâle ils étaient repartis parce qu’ils s’étaient tout dit sans rien avoir compris. Ils parlaient de nouvelle naissance. Ils ne s’y attendaient pas. C’est dommage de devoir mourir tous les jours. Une nouvelle naissance.

J’ai roulé dans la neige et me suis arrêté au bord d’un étang sombre. Parce qu’il était temps. J’ai fait claquer ma portière et j’ai coincé mon âme et puis j’ai marché. J’ai marché le long d’un fil sous une neige crasse, pendant des heures j’ai fait craquer mes pas. Mon été soixante sept au bout du couloir.
J’ai coincé mon âme dans la portière. Des souvenirs dépeuplés une fraction de seconde. Une nouvelle naissance. Je ne m’y attendais pas.
J’ai claqué la portière sur mon âme.
J’ai saisi ma chance et j’ai marché le long du fil jusqu’au bout de mon envie.
Assise, désinvolte, elle me souriait avec des airs de plus jamais. Balafrée comme un jour de juillet soixante sept avec un sourire qui en disait long. Du noir dans ses cheveux, du rouge dans ses yeux. Une nouvelle naissance. Je ne m’y attendais pas.

Je l’ai regardée pendant des heures et je l’ai reconnue. Du vide, du doute, des paroles maudites et des rêves enfouis. Sa chevelure brune et ses yeux écorchés. Ses rides de l’iris et ses amours tailladées. Des airs d’ange vaincu et puis de jamais plus.
Mon été soixante sept me crache dans la gueule. Nouvelles naissances gâchées, jeunesses dilapidées. Je n’étais pas celui-là ; Cela n’a jamais pu être moi. Je n’étais pas celui là. J’ai marché le long du fil pendant des heures en essayant de me souvenir ; Je voulais me souvenir de tout et de tout ce qu’on s’était dit. Sans rien avoir compris. J’ai laissé ma bagnole et j’ai marché le long de mes doutes et j’ai marché jusqu’à m’écoeurer de tous ces souvenirs. Perdu au bout du bout des mondes morts. Encore des souvenirs qui cognent pendant des heures.
Des souvenirs perdus et des âmes écrasées dans le bruit d’une portière qu’on claque.

Et j’ai marché des heures et puis j’ai pris le train de onze heures trente et je ne savais plus si elle était partie pendant l’été soixante sept ou dans un hiver à venir. Le train m’a emporté et j’ai compté les minutes de silence de ma folie. Trois fois les heures ont cogné contre la vitre.

Lille Europe, minuit vingt. Sa pendule grince au dessus des murs gris ses visages au désespoir attendent leur tour sur des bancs en acier. Mes minutes de silence peuvent durer des heures je me fracasse contre l’ennui. Vos heures. Vos heures sont attablées en terrasse et distillent nos jours qui s’enfuient au compte goutte.
Une sonnerie brûlante, une voix informe baragouine du rien, et puis les heures s’ébrouent. Les heures, avec leurs visages de nulle part, avec leurs airs de certitude et de j’y suis j’y reste. J’ai attendu des heures que les heures se taisent. Les heures sont venues frapper trois fois à la vitre de mon compartiment au moment où je m’y attendais le moins. Les heures m’ont tiré du sommeil et ont franchi les limites de ma patience. Les heures. Les heures sont les bourreaux de mes avenirs vaincus. Les heures sont restées coincées sur mon âme en juillet soixante sept. Nos heures durent des heures et je ne les compte plus.

 

 

 

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